Flashback









  

:: Erik Van Looy ::
:: The Loft ::

"J’aurais pu devenir le premier réalisateur à refaire trois fois son propre film."

Propos recueillis par Laurent De Groof © à Bruxelles (septembre 2014).

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Cine-files : Pensez-vous qu’il soit préférable d’avoir vu le film original (The Loft est le remake du film de Erik Van Looy de 2008) ?

Erik Van Looy : Non, je pense qu’il vaut mieux oublier le premier film. Il a déjà six ans. Je crois que cela gâche un peu la surprise.

Cine-Files : Quels sont les avantages de travailler sur un remake plutôt qu’une œuvre originale ?

E. Van Looy : C’est toujours plus facile de monter sur un vélo quand on a déjà roulé. (rires) On se sent plus à l’aise. C’était mon premier film à Hollywood et j’avais donc beaucoup de pression sur les épaules. Ce film était un gros risque, il était donc nécessaire d’avoir confiance en moi. Connaître son sujet est évidemment un avantage. Les nouveaux comédiens avaient vu et aimé le premier film, ils avaient une certaine confiance en moi. C’est plus facile. On se sent plus à l’aise sur le plateau. Tout comme Matthias Schoenaerts qui reprenait son propre rôle. Matthias était immédiatement dans son personnage. Ce qui a aussi rassuré les acteurs américains. Il savait déjà comment fonctionnait le film. Ce qui ne veut pas dire que je vais faire des remakes de The Loft, de Ad Fundum ou de De Zaak Alzheimer jusqu’à la fin de mes jours. (rires)

Cine-files : Etes-vous satisfait du résultat ?

E. Van Looy : Je suis très content d’avoir fait ce remake. J’estime que le scénario de Bart De Pauw est extraordinaire et qu’il doit être connu à travers le monde. Faire un film belge à succès permet de voyager, de participer à des festivals aux Etats-Unis mais cela ne va jamais attirer le grand public. Nous avons de grandes ambitions pour ce remake. Pour « conquérir le monde », il faut commencer par attirer les américains. Je suis très heureux d’avoir fait ce film mais je vais tout de même m’arrêter là. Même si je suis contacté par Bombay ou Dubaï pour faire un remake bollywoodien du film, je ne le ferai pas. (rires) Ce serait intéressant mais non merci.

Cine-Files : Les remakes font souvent peur aux spectateurs…

E. Van Looy : Oui, c’est vrai mais il s’agit ici d’un film belge qui a bien marché. Nous avions atteint 1,2 millions de spectateurs. C’est très bien mais j’estimais que ce n’était pas assez. Si on veut un vrai succès mondial, il faut passer par les Etats-Unis.

Cine-Files : Quel était le défi de ce remake ?

E. Van Looy : Beaucoup de choses en réalité… Ce sont de nouveaux acteurs à diriger, une autre langue à apprivoiser, un rythme différent. C’est un autre film et il faut tout faire pour que cela fonctionne.

Cine-Files : Vous faites donc aujourd’hui partie du petit club des réalisateurs à avoir fait un remake de son propre film. Mais il s’agit aussi d’un remake du Loft d’Antoinette Beumer en 2010…

E. Van Looy : Oui, c’est un cas un peu particulier puisque Antoinette Beumer avait déjà fait un remake de mon premier film. C’était une production hollandaise. On peut aussi se demander pourquoi faire un remake dans la même langue ? Dans le fond, la problématique est la même. Il n’y a pas d’intérêt pour un film belge en Hollande. Nous avons donc lancé le remake avec des célébrités hollandaises qui a tout de même attiré près de 500.000 spectateurs. Ce qui est bien.

Cine-Files : Vous avez contribué à la réalisation du film de la version d’Antoinnette ?

E. Van Looy : Oui, mais uniquement parce qu’il y a eu un petit accident sur le tournage. Un morceau du décor s’est effondré et a brisé la mâchoire de la réalisatrice. Il n’était pas possible de postposer le tournage car certains des comédiens devaient se rendre sur de nouveaux projets. Ils ne savaient pas trop comment poursuivre et ils m’ont donc contacté aux Etats-Unis (où j’étais à ce moment) et ils m’ont demandé de reprendre une partie du tournage. J’étais très ennuyé parce que je n’étais pas intéressé mais je ne voulais pas les laisser dans les problèmes. Je connaissais aussi la productrice Hilde de Baerdemaeker qui avait produit De Zaak Alzheimer. J’ai rencontré la réalisatrice à Amsterdam qui m’a donné ses notes. J’ai tourné pendant cinq ou six jours. J’ai donc réalisé deux versions et un petit bout de The Loft. (rires)

Cine-Files : Vous ne regrettez pas de ne pas l’avoir réalisé complètement ?

E. Van Looy : Je ne sais pas. A l’époque, on me l’avait proposé mais on parlait déjà de la version américaine. Les producteurs américains me l’avaient déconseillé car ils disaient que si j’avais déjà fait le film deux fois, les acteurs n’allaient jamais accepté que je fasse le film une troisième fois. Un avis que j’ai suivi et cru. Aujourd’hui, je ne sais pas… Il y a eu plusieurs années qui se sont écoulées entre les films. J’aurais pu devenir le premier réalisateur à refaire trois fois son propre film. (rires) Cela aurait été un beau record du monde. Cecil B. DeMille a fait deux fois Les Dix Commandements, Michael Haneke a fait Funny Games… Hitchcock a aussi fait L’Homme Qui En Savait Trop… Trois fois,… je ne vois pas. Devenir champion du monde de ses propres films aurait été bien. (rires)

Cine-Files : Le thriller est un genre que vous affectionnez particulièrement.

E. Van Looy : Oui, je ne veux faire que des thrillers.

Cine-Files : Est-il encore possible d’être original dans le thriller ?

E. Van Looy : Oui. Il est vrai que les suspenses sont devenus plus prévisibles mais il y a encore moyen de surprendre le spectateur. Un scénario comme The Loft est une suite de rebondissements. Le film apporte aussi un sujet de discussion intéressant, il parle de l’adultère. C’est un thème qui nous préoccupe tous, auquel nous y avons pensé un jour ou l’autre. The Loft n’est pas seulement un thriller mais également une réflexion. De Zaak Alzheimer avait aussi été abordé ainsi et ce sera le cas de mon prochain film : De Premier qui sera un peu comme de Bourne Identity.

Cine-Files : On a pu lire qu’Yves Leterme avait quelque peu inspiré le film De Premier ?

E. Van Looy : Inspiré, non. C’est un thriller axé autour du Premier Ministre belge. C’est un personnage fictif. (rires) C’est l’histoire de son kidnapping par des terroristes. Il y a beaucoup de revirements de situations. J’ai été influencé par des films tels que la série des Bourne, Air Force One avec Harrison Ford et la série 24. Ce n’est pas basé sur la vie d’Yves Leterme. Je pense plutôt que The Loft a été inspiré par Yves Leterme. (rires) Le film est une fiction mais il reste ancré dans un cadre très réaliste. Nous avons été manger avec Yves Leterme pour lui exposer le scénario et voir si notre histoire était cohérente. Il nous a plus servi de consultant. Il nous a donné beaucoup de conseils intéressants. Je ne savais par exemple pas qu’un Premier Ministre ne passait jamais les détecteurs de métal. Il a été d’une grande aide. Ce sera pour 2016… Il nous faudra bien deux ans pour mettre tout en place.

Cine-Files : Vous avez parlé du thème de l’adultère dans Loft. C’est un sujet plus difficile à aborder aux Etats-Unis qu’en Europe ?

E. Van Looy : Non. Ils trompent leur femme autant qu’ici. (rires) C’est un thème très ambigu. Cela reste un sujet tabou pour beaucoup de couples. Je pense que la présence de l’adultère donne un ton plus profond au film. Au début du projet, nous avons rencontré un producteur qui trouvait que le fait que les cinq hommes trompent leur femme était de trop. Il voulait au moins un gentil dans le groupe mais ce n’était pas notre objectif. Je suis très content d’avoir produit le film avec Woestijnvis en association avec Anonymous Content à qui l’on doit notamment la série True Detective avec Matthew McConaughey et Woody Harrelson. Anonymous font des films plus extrêmes.

Cine-Files : Votre casting est extraordinaire.

E. Van Looy : Absolument.

Cine-Files : Est-ce une coïncidence que la plupart de vos comédiens ont été révélés par des séries TV ?

E. Van Looy : Oui, tout à fait. Sauf Matthias Schoenaerts. (rires) On ne peut pas garder le contrôle créatif d’un film comme celui-ci avec des comédiens comme George Clooney, Matt Damon ou Brad Pitt, le budget du film devrait monter à 100 millions de dollars. Je ne sais pas si un thriller de ce genre verrait le jour à ce prix. Qui plus est, Matt Damon ou George Clooney n’aurait pas besoin de moi pour réaliser le film. Ils téléphoneraient à Steven Soderbergh ou Martin Scoresese. Je suis très content de mes comédiens. Ce sont tous des personnes très charismatiques. Ils forment un ensemble qui fonctionne bien. On a parlé un moment de Tobey Maguire pour jouer le rôle de Wenworth Miller et de Matthew McConaughey pour celui Karl Urban. Il est très difficile de trouver une bonne balance de comédien autour d’une star reconnue.

Cine-Files : On se doutera alors que la star va s’en sortir…

E. Van Looy : Oui, absolument. La star voudra un rôle plus grand. J’aime mes cinq comédiens. Ce sont des amis. Ils sont crédibles à l’écran. Ils peuvent tous être innocents ou méchants. Ils sont très bons. Ils étaient prêts à s’investir dans leurs personnages et les sujets difficiles du film. Il y a des scènes de nu masculin, on parle d’homosexualité…

Cine-Files : Quelles cinq stars auriez-vous néanmoins choisies ?

E. Van Looy : Matthias ferait de toute façon partie de mes choix. Koen de Bouw qui est mon acteur belge préféré… James Marsden qui est un comédien formidable. Et mon acteur favori en ce moment : Michael Fassbender. Matthew McConaughey aussi. Je l’ai rencontré pour le rôle de Karl Urban. Il m’avait donné rendez-vous sur un parking de Santa Monica. (rires) Je me suis rendu sur un grand parking vide. Une Ranch Rover aux vitres teintées s’est approchée de moi. Je n’étais pas rassuré. C’était Matthew. Il voulait qu’on parle dans sa voiture. Dès que je suis monté, cinq photographes se sont rués sur nous. (rires) Matthew venait de devenir papa et les paparazzis le suivaient partout. Il leur a dit que j’étais un réalisateur et qu’on discutait d’un scénario. C’était très intéressant. Malheureusement, il a préféré faire Killer Joe à l’époque qui était un autre thriller. Il ne voulait pas faire deux suspenses les uns après les autres. C’est un type très sympa et un grand acteur.

Cine-Files : Vous avez fait beaucoup d’interview de stars du cinéma pour la télévision. Quelle question poseriez-vous au réalisateur de The Loft ?

E. Van Looy : (rires) Probablement les mêmes questions que vous. (rires) Pourquoi avoir fait un remake ? Je ne crois pas que mes questions seraient très originales. C’est difficile à imaginer et le problème est que je connais trop bien Erik Van Looy. Je sais surtout à quelle question il ne veut pas répondre. (rires) J’aime qu’on me demande pourquoi j’ai voulu faire un remake de ce film parce qu’il y a une bonne raison. J’aime ce scénario par-dessus tout et je veux qu’il soit vu par un grand nombre de gens. C’est mon premier film américain. Je poserai peut-être même cette question deux fois pour être sûr d’y répondre. Comme je l’ai expliqué au début de cette interview, je veux que les spectateurs comprennent pourquoi j’ai voulu refaire cette histoire.

Cine-Files : A l’époque de De Laatste Show, vous finissiez vos interviews en embrassant les actrices. Embrassez-vous aujourd’hui les journalistes ?

E. Van Looy : (rires) Non… Cela dépend de la journaliste. (rires) Non, je rigole. Mais cela m’a mis dans des situations difficiles car il m’est arrivé de rencontrer, en tant que réalisateur, des comédiens que j’avais « piégés ». Heureusement, il ne me reconnaissait plus. Je me souviens de Pierce Brosnan… J’ai fait une centaine d’interviews. En général, tout se passait bien. Ils acceptaient de répondre à mes questions « idiotes » avec humour. Une fois, on m’a mis à la porte. C’était avec Catherine Zeta-Jones. Son entourage n’appréciait pas beaucoup mon humour… J’avais peur qu’un jour Catherine Zeta-Jones demande à me rencontrer pour un projet. Ce qui est arrivé… mais tout s’est bien passé.

Cine-Files : Vous êtes fan de foot. A quand un film sur le sujet ?

E. Van Looy : C’est difficile. On me demande souvent quand je ferai un film sur l’Antwerp. Ils sont en deuxième division maintenant. J’attends un happy end pour faire le film. (rires) C’est un sport difficile à mettre en image. Même John Huston avec Escape To Victory a eu très difficile. Qui plus est, les films de foot ne fonctionnent pas aux Etats-Unis. Ils prendraient d’autant plus mal qu’un belge réalise un film de foot chez eux. (rires) Je ne pourrai même pas entrer dans le pays après la défaite que nous leur avons infligée au Mondial. (rires) Je ne sais pas. Je vais commencer par De Premier et puis on verra…

Cine-Files : Et que pensez-vous des séries TV ?

E. Van Looy : Ce n’est pas trop mon genre. Je n’aime pas trop tourner. J’aime qu’un film s’arrête après 30 ou 50 jours de tournage. Si je me lance dans une série, je sais que je voudrai filmer tous les épisodes. Ce qui me prendra des années…

  
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